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Photo du rédacteurAnnie Boyer-Labrouche

Attention...

L'être humain est un être biologique, mais aussi social. Il a une vie intérieure et inconsciente. Il ne faut pas le réduire au biologique sous peine d'atteintes graves aux libertés individuelles, au risque de la perte d'humanité.


Masque de Bamiléké. Source: BnF

Il n'y a pas que la vie biologique. L'être humain a une vie sociale (travail, famille, relations amicales), une vie intérieure avec une vie inconsciente. L'épidémie de coronavirus a pris de court les politiques et la population. C'est le biologique qui a été privilégié. La nouvelle paraissait bonne. L'Homme semblait compter plus que l’Économie. Il était nécessaire de faire de la protection, à défaut d'anticipation et de vision. La population a adhéré et accepté un confinement brutal. Les conséquences de cette décision sont dramatiques pour l'humanité de l'être humain. Alors qu'il était possible d'anticiper; les épidémies en Chine, en Asie, en Europe se succédaient. Elles se développèrent en série chez nos voisins du Sud, en Italie, en Espagne. L’État et les scientifiques restèrent dans le déni: impréparation pour l’État, grippette pour les scientifiques, exception faite des plus éveillés et des lanceurs d'alerte dont certains y laissèrent la vie. 


Le déni est une attitude de refus de prendre en compte une partie de la réalité vécue comme inacceptable, dans notre cas inimaginable. Or, la réalité de la pandémie Covid-19 était tout à fait prévisible, puisque la catastrophe italienne avait lieu sous nos yeux. Le déni est un mécanisme de défense par lequel le sujet, ici l’État, refuse de reconnaître la réalité d'une perception ressentie comme menaçante et traumatisante: trop inconnue, trop dangereuse, devenue irreprésentable par le psychisme.


Les 3 petits cochons

L'histoire des 3 petits cochons explore la capacité d'anticipation et de courage dans l'adversité. Devant prendre leur autonomie, les cochons réagissent différemment. Les deux premiers restent infantiles, préfèrent s'amuser et se construisent des maisons de paille et de bois au moindre coût, avec des matériaux trouvés ici ou là. Lorsque le danger survient, sous les traits du grand méchant loup noir, leurs maisons s'envolent et ne les protègent pas. Ils se réfugient chez le cochon qui a construit sa maison en briques. Celui-ci a décidé de bâtir une maison solide pour faire face aux aléas de la vie. Il a sué pour monter ses murs et faire son toit et a anticipé les dangers potentiels. Bienveillant, il accueille ses frères, les protège et il arrive à vaincre le loup.


1,  2, 3,  soleil!

L'impréparation étant totale quand l'épidémie de coronavirus commença à courir en France, la réaction primordiale fut la peur. On boucla tout. 1, 2, 3, soleil!  Le confinement sembla être la seule solution pour éviter des phénomènes de panique. Il fut décidé de façon brutale, sans préavis, d'un jour à l'autre, d'une heure à l'autre pour les bars et les restaurants. Cet aveu d'impuissance dans la gestion d'une épidémie causée par un virus inconnu entraîna une action-réaction. Devant le fait accompli, la population sidérée accepte et joue le jeu.


Le bal masqué

L'inconscient va bon train, le déni aussi. En quelques heures, les libertés individuelles sont restreintes. S'ajoute l'infantilisation des attestations assorties de la vérification des cartes d'identité. On met des interdits inadmissibles; on crée des situations inhumaines. Comme le coronavirus est contagieux, il faut à tout prix empêcher les gens de se contaminer. On interdit les visites dans les Ehpad. Protéger les "vieux" en les isolant, les confinant dans le confinement du confinement, sans tenir compte de leur psychologie, ignorant la possibilité d'un syndrome de glissement qui peut les tuer en quelques semaines. On ferme brutalement les centres médico-sociaux, confinant dans les familles des personnes handicapées ayant de grandes difficultés, souvent comportementales. On confine des familles en ignorant les violences conjugales et les maltraitances aux enfants, renforçant ces tabous. Pour sauver les gens, on leur dit brutalement: "on va vous mettre dans le coma" et après quelques semaines, ils se réveillent dans une autre ville et sont interdits de visites. Quand on sait combien l'éveil du coma est complexe et douloureux, on induit une situation si violente qu'elle peut causer des dégâts mentaux irrécupérables. On accouche seule, on meurt seul. Le corps de la victime du coronavirus est aussi interdit aux familles et devient tabou. La mort reste inaccessible. Même les enterrements sont contingentés. C'est un déni grave d'interdire les visites aux personnes en fin de vie et les rituels sacrés.


La mascarade atteint le sommet avec la saga des masques. Il devrait être évident pour tous les médecins que le masque sanitaire est un outil de prévention pour éviter la contagion d'un virus, beaucoup de gens contaminés étant asymptomatiques et la transmission se faisant par l'expectoration de gouttelettes. Il  sert à filtrer l'air échappé entre les voies respiratoires et l'air ambiant. Le jeu autour du masque est signifiant des phénomènes inconscients du déni.

Il est porteur de l'ambivalence. 

Le masque protège et en même temps cache le visage humain en transformant son aspect naturel. Il cache les expressions. Il modifie la voix et entrave la communication orale. Il isole les individus les uns des autres. Le masque suscite la même ambivalence que le voile. Là aussi, l'inconscient est actif. La plupart des dirigeants dans le déni ne le mettent pas, comme s'ils étaient au-dessus du risque, ne pouvant être ni atteints, ni contagieux.


Pensez, Pensez, Pensez

Tout ce qui est arrivé aurait dû être pensé, doit être pensé. Le risque de la contamination de toute une population avec le risque d'un grand nombre de décès a, dans l'impréparation la plus totale, sans aucune réflexion, sans aucun débat, créé des situations dans lesquelles on pourrait reconnaître des mécanismes propres à la perversion. L'ignorance a décuplé les mensonges. Le flou autour du masque est un dévoilement du déni. Le défaut de protection est patent. Celle-ci se fait au détriment de la liberté individuelle et de l'intimité avec une intrusion dans les systèmes familiaux, par l'isolement et l'interdit du toucher, physique, mental et moral. Les conséquences économiques vont être terribles et causer bien des drames avec une augmentation des suicides. Les projets de beaucoup tombent à l'eau, ainsi que leurs rêves. Les faillites vont se succéder, en particulier dans les métiers qui touchent à la convivialité et à la culture. Les jeunes en fin d'études ou début de vie active vont être les premiers pénalisés. Les risques de stress post-traumatique, de dépressions, d'addictions, de suicides sont très élevés. 


Attention déshumanisation

Il faut penser cette crise sanitaire. Ce n'est pas une guerre. La métaphore guerrière n'est pas appropriée. Non, l'homme face à la nature n'est pas tout -puissant. Il ne doit pas jouer les apprentis sorciers. Oui, l'inconscient existe, individuel et collectif. L’État a aussi un inconscient. Cette crise a mis en évidence sa prise sur un risque, l'ambivalence entre le bien-faire pour protéger la population et des monstruosités possibles, par les interdits, l'atteinte aux libertés et la prise de contrôle. Il y aura bientôt un retour du refoulé. Les manifestants ont eux-aussi été assignés à résidence pendant la crise sanitaire. Les gens ont maintenant envie de se manifester, de vivre, de se rencontrer, de se parler et les familles de se réunir.


L'impératif sanitaire, avec le manque total d'anticipation, semble avoir pris la pas sur la réflexion et le débat, mettant en danger la liberté du peuple. Pour éviter la panique et sécuriser l’État, des mesures qui ont des conséquences graves sur l'humanité, ce qui fait l'humain et ses liens avec les autres et les proches, ont été prises aveuglément, faisant des dégâts psychologiques irréparables, au risque de l'ouverture d'une brèche vers une société de surveillance et de déshumanisation. Il va falloir se battre pour les valeurs de liberté et d'humanité. L'intolérance au malheur peut avoir comme revers la déshumanisation et la bascule de la civilisation. 

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